On veut vivre face à un incinérateur
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L’incinérateur et son panache de fumée sont caché en dessous du phylactère …
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Les gigantesques cheminées aux portes de Paris, soufflant leurs nuages à l’infini dans le ciel de Saint-Ouen et Ivry-sur-Seine, donnent l’impression d’un mouvement perpétuel de l’activité industrielle. En temps de crise, quand les politiciens parlent de la nécessité de réindustrialiser la France, le nuage de l’usine peut être considéré comme une forme d’espoir. Mais bien sûr, la plupart d’entre nous ont conscience que ces sites ne fabriquent rien de matériel. Ils sont là pour brûler les excès d’une consommation ostentatoire: nos déchets de plus en plus somptueux.
Pierre Damien Huyghe écrit de l’usine : « Dans ce lieu n’entre pas qui veut: l’endroit n’est pas transparent, plutôt clos, soumis à des règles d’accès. En cela l’usine se distingue profondément d’une scène de théâtre. À la différence de cette dernière, elle n’est pas disposée ni éclairée pour attirer le regard »(1). Bien qu’on puisse prendre les sites d’incinération pour des usines traditionnelles, ils s’en démarquent par leur appellation de « centrales », « sites classés ». Les responsables n’aiment pas que leurs bâtiments se retrouvent sous le feu des projecteurs ou attirent l’attention du public. Et s’il arrive un jour que les cheminées se mettent à luire et transpirer sous les lumières de l’activisme environnemental, les responsables souffrent encore plus. Mais alors comment l’art peut-il habiter ces lieux jalousement gardés ? Les friches industrielles transformées en Art-factories, oui, mais l’art s’installant dans les usines en activité ? Lors de l’inauguration du nouvel incinérateur à Saint-Ouen en 1990, les journaux titraient « Fini les bâtiments industriels ternes et glauques? A Saint-Ouen, la nouvelle usine d’incinération d’ordures ressemble plutôt à une oeuvre d’art » (2). Cependant, si nous observons le site aujourd’hui on peut rapidement s’apercevoir que cet incinérateur ne ressemble pas à une cathédrale d’art, mais plutôt à un vague hangar entouré de terrains délaissés. Vu de l’extérieur, Ivry-sur-Seine présente mieux ; avec sa façade de prismes diamantaires et ses cheminées en forme de fusées, le bâtiment a été conçu pour être la figure de proue de l’ancien site industriel réhabilité en lofts, aujourd’hui très prisés. Mais au quotidien la seule interface entre l’incinérateur et les personnes vivant à proximité, c’est le nuage.
Étant donné que nous ne connaissons pas la nature précise des processus technologiques à l’intérieur de l’incinérateur, seul le nuage nous permet d’imaginer l’intérieur des fours. Et c’est sur le nuage que nous projetons nos angoisses et nos peurs. L’objet de l’intervention artistique Nuage Vert (3), est d’éclairer la forme du nuage et ses significations, de définir ses contours qui nous échappent en le capturant dans son mouvement en temps réel. L’éclairage du nuage n’est pas seulement un geste symbolique, mais aussi un processus mis en place pour produire des échanges entre les habitants et les différents acteurs des questions environnementales. Sur le plan social ceci implique un engagement commun entre associations locales, pouvoirs publics, scientifiques et industriels, en vue d’élaborer ensemble un nouveau discours autour de la question de la production des déchets. Sur le plan pratique, la mise en place du projet, nécessite la participation croisée de citoyens et de partenaires scientifiques. Nuage Vert est une création indépendante, libre d’intérêts financiers. C’est sans doute cette autonomie, d’un projet dont la nature est par ailleurs inoffensive, qui a fait peur aux autorités locales et les a conduites à bloquer, censurer et remettre en cause la réalisation de l’œuvre à Saint-Ouen (2009) et à Ivry-sur-Seine (2010) (4).
A partir du moment où des personnes et des associations locales se penchent sur le problème des émissions du nuage et de leur possible nocivité, une politique de la crise de nerf s’engage. C’est pour cette raison que le Syndicat Intercommunal de Traitement des Ordures Ménagères de l’agglomération parisienne (Syctom), pour éviter tout problème avec les riverains, a décidé de reconstruire l’incinérateur d’Issy-les-Moulineaux avec des cheminées invisibles de la rue et un nuage d’émission d’une parfaite transparence. Les filtres à gaz sont les mêmes, l’usine consomme plus d’énergie, mais la présence de l’installation de traitement des déchets devient imperceptible, occulte pourrait-on dire.
Les exploitants d’incinérateurs sont toujours sur la corde raide avec les résidents locaux – a cause de l’odeur peut-être. Après les difficultés de la procédure de consultation habituelle avant la reconstruction de la centrale d’Ivry, le Syctom n’est pas en état de pouvoir envisager une illumination du panache sur ce site. Une occasion perdue. L’incapacité de soutenir une initiative ‘bottom up’, n’émanant pas d’une hauteur hiérarchique, est symptomatique de la manière dont, en France, le discours sur le traitement des déchets relève d’une présence hégémonique sur une ligne défensive par rapport à la société civile (5). Impossible d’entendre des propositions individuelles ou provenant de groupes de « l’extérieur ». Pire encore, le grand public est mis sur le banc des accusés. Le consommateur est tenu pour coupable et responsable de l’histoire des déchets et du problème des émissions polluantes: « Stop au gaspillage », « Jeter moins, réutiliser », « Réduisons nos déchets ! »,ces slogans ont été projetés sur la façade de l’incinérateur d’Ivry après l’éviction du projet Nuage Vert, signe d’inversion d’une culpabilité affichée. Le public est informé mais n’a aucun moyen d’action, même imaginaire. En l’absence d’échanges constructifs entre les riverains et l’usine d’incinération, il n’est pas étonnant que les quelques forums de discussion organisés par le SYCTOM se terminent généralement par de fortes décharges pulsionnelles.
Si pour Nuit Blanche, cette année, les nuages de l’incinérateur d’Ivry-sur-Seine sont embellis dans un ballet de lumière colorée (6), qu’importe? Nous sommes nourris d’esthétique plutôt que de conscience politique. A l’opposé du vert « sans autorisation » de 2010, la rose et ses couleurs complémentaires, dans une manifestation culturelle majeure, calmera les esprits et ne soulèvera aucune question. Positif, à l’aise avec la langue de la communication et en conformité avec l’industrie culturelle, le rose ne risque rien. Le fait que la source de lumière soit située sur le site de l’incinérateur et que la cheminée elle-même soit éclairée ne laisse aucun doute : la vie en rose c’est la vie de l’usine. Le rose - à côté de la pureté du blanc – nous conduit au bonheur, à la compassion, à la féminité. L’ambiguïté du « nuage » s’absente derrière l’élégance politiquement correct du « panache » et la référence royale (7) confirme au spectateur que, de fait, l’incinérateur est le roi d’Ivry. Curieusement, l’utilisation d’une transition de couleur contrôlée par ordinateur a du sens pour quiconque est familier avec l’indice de qualité de l’air d’Airparif, mais cette résonance reste sans raison et dans une coloration de surface. Le nuage est traité comme un écran de fumée, masquant toute question inhérente à l’activité de l’usine.
Le nuage qui flotte au dessus de l’usine d’incinération n’est pas une surface de projection comme une autre. Le Centre Multifilière est un laboratoire à ciel ouvert contesté par les résidents locaux et les organisations indépendantes - en particulier pour la composition chimique de ses émissions atmosphériques (8). De son nuage poussiéreux descend une culture officielle présentant un sain spectacle pour les masses. Comme Theodor Adorno a pu le dire: « C’est par le haut que l’industrie culturel s’assimiler délibérément les consommateurs » (9)
1) Pierre-Damien Huyghe, “Un appareil de travail”, L’usine dans l’espace francilien, dir. Martine Tabeaud, Richard Conte et Yann Toma, Publications de la Sorbonne, 2001
2) “Belle comme une poubelle”, Le Nouvel Observateur, 13.06.1990
3) www.nuagevert.org
4) “Le rayon vert divise Saint-Ouen”, Marie Lechner, Libération,
5) Reiner Keller, “Waste – the societal construction of the precious, The public debate about waste in Germany and France” “Müll – die gesellschaftliche Konstruktion des Wertvollen”, Verlag für Sozialwissenschaften, Wiesbaden, 2 Auflage 2009
6) Programme de la Nuit Blanche 2012: “Jacqueline Dauriac présente son impressionnante installation lumineuse “Suivez mon panache rose”, intervention sur l’usine d’Ivry-sur-Seine”
7) The title of Dauriac’s installation refers to a well known rallying cry of King Henry IV before going to battle “Suivez mon panache blanc”. The word panache refers to both the feathers on the Kings head and his aura. The Incinerator in Ivry-sur-Seine is the largest incinerator in France and could be called the king of incinerators.
8)« Fumées noires sortant de l’incinérateur d’Ivry le 6 septembre 2012 » Collectif 3R
9)Theodor Adorno, The Culture Industry, page 98, Routledge, 1991, New York
Entre 18h30 et 22h30 le 27 novembre 2010 - sous moin 0ºC - un grand halo vert apparaisse sur la sortie du cheminée de l’énorme incinérateur d’Ivry-sur-Seine. Mais cette fois la police n’a pas pu l’interdire (le nuage est projeté depuis le toit d’un bâtiment privé) et personne a appelé les pompiers
Remerciements à Stéphane Langlois, Vincent Guimas, Ewen Chardronnet, Anne, Maryam et Ashley d’Ivry-sur-Seine, sans qui cette dernière édition ne serait pas possible.
Voici quelques images de la soirée:
Images nº 1 de HeHe
Image nº 2 de YUKI KAWAMURA
Images nº 3, 4 & 5 de HeHe
« Denise Bourdier Vice Présidente du Comité de Propositions pour la Réduction et le Traitement de nos Déchets à
Madame Jacqueline Rouillon Maire de la Commune de Saint Ouen
Le 10 juillet 2010
Madame,
Vous avez lors du bureau municipal du 17 mai dernier pris la décision d’interdire le déroulement de l’installation artistique du Nuage Vert sur la commune de Saint Ouen. Au regard de l’étude de cette manifestation, de la qualité des éléments préparant et accompagnant son déroulement, de son apport gratuit à la ville dans le lancement de la campagne pour la réduction des déchets, le comité de propositions pour la réduction et le traitement des déchets avait donné un avis favorable à sa réalisation.
Vous justifiez votre parti pris d’interdire la mise en œuvre du nuage vert par le fait que la fumée verte puisse être mal perçue de la population, et qu’elle ajoute des peurs à l’incertitude.
Le programme du nuage vert prévoyait une communication importante en direction de la population sur le thème « l’incinérateur n’existe que parce que nous produisons des déchets, réduisons nos déchets et trions pour que l’incinérateur brule moins et plus propre ». Cette communication n’avait aucune incidence financière pour la commune et venait sous ‐ tendre celle du service de l’environnement.
Votre interdiction traduit deux attitudes :
Vous considérez que la population de Saint Ouen est infantile, incapable de comprendre et d’adhérer à une démarche artistique au point d’être inquiétée parce que le nuage passe du blanc au vert.
Vous avez par rapport à ce nuage un reflexe de peur
En tant que vice présidente du Comité de Propositions pour la Réduction et le Traitement de nos Déchets, je me suis mise à l’étude de l’incinérateur et de son environnement. Je n’ai rien trouvé dans les documents que j’ai pu consulter qui soit susceptible d’engendrer la peur au point de ne pouvoir colorer la fumée de l’incinérateur.
Je ne peux pas croire que ce réflexe de peur repose de votre part sur des causes infondées. Vous avez donc connaissance de données inquiétantes qui n’ont pas été publiées. Je vous demande de les rendre publiques dans les plus brefs délais.
Votre décision a instillé le doute dans un dossier qui à mes yeux était clair. Il faut que rapidement les audoniens soient informés.
Dans l’attente, recevez mes salutations.
Denise Bourdier
Lettre envoyée par mail et par courrier à Madame Le Maire Copie par mail aux élus »
Fuite. Une lettre écrit par Madame le Maire à Syctom pour demander leur désengagement parce que “”rien n’indique ni ne garantit à ce jour que la fumé verte proposée soit perçue de façon sereine et positive par la population”
Nous sommes actuellement dans l’attente de la réponse de la municipalité de Saint-Ouen en ce qui concerne leur accord avec le projet Nuage Vert. La commission de décision organisée le mardi 11 mai, n’a malheureusement pas été en mesure d’en prendre hier.
18 mai 2010 - EDIT : mauvaise nouvelle du jour, la municipalité refuse toujours de soutenir le projet.
Nuage Vert a été sélectionné pour la première édition du Prix COAL Art&Environnement. La remise de prix s’est tenue le 30 mars dernier et nous félicitons le lauréat Thierry Boutonnier.
COAL défend une nouvelle génération d’artistes impliqués sur les enjeux sociaux et environnementaux et soutient le rôle incontournable de la création et de la culture dans les prises de conscience et les mises en oeuvre de solutions concrètes.
45 affiches en sérigraphie “Nuage Vert aura-t-il lieu”, 66 x 46 cm, numérotées et signées, sont en vente pour 50 euros. Les bénéfices seront réinvesti dans le projet Nuage Vert.
écrire un mot ici: contact {AT} hehe.org
Le Rayon vert divise Saint- Ouen
Un ‘grand angle’ écrit par Marie Lechner est publié le 3 juin 2009 dans Le Libération.
En banlieue parisienne, un duo d’artistes tente de sensibiliser l’opinion au problème des déchets en colorisant les fumées d’un incinérateur. Un projet qui suscite une polémique chez les écologistes, les élus et les industriels…
Le 27 mars, un nuage vert apparaît dans le ciel de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis). Le panache de fumée qui s’échappe de la cheminée de l’incinérateur luit d’une couleur intense. Le phénomène est observé une première fois à 19 heures durant vingt minutes, puis une nouvelle fois vers 20 h 15, avant de disparaître à 21 h 20. Des habitants s’inquiètent. Les pompiers dépêchés sur place, constatent, impuissants, qu’il s’agit d’un éclairage, pas d’un incendie ou d’une pollution suspecte. En réalité, un puissant laser vert épouse les contours fluctuants des émissions de vapeur d’eau, formant un impressionnant nuage coloré.
Le faisceau laser provient d’un bâtiment sur l’île des Vannes, située à quelques centaines de mètres de l’incinérateur, où le duo d’artistes HeHe teste son dispositif, à la dérobée. «En l’illuminant, nous pensions qu’il pourrait sensibiliser le public à la question de la pollution, des déchets, et agir comme un signe appelant à la réduction de la consommation», racontent Helen Evans et Heiko Hansen. L’idée de ce Nuage vert (1) leur trotte dans la tête depuis 2003, alors qu’ils habitent près de la station Garibaldi à Saint-Ouen, avec une vue imprenable sur l’usine d’incinération. «Nous trouvons son énorme panache très beau et terrifiant à la fois.»
Des prix et une bourse
Les artistes entrent alors en contact avec le syndicat intercommunal de traitement des ordures ménagères (Syctom), en charge de l’incinérateur de Saint-Ouen, pour lui soumettre leur idée. Le Syctom décline poliment «le projet ne s’inscrivant pas dans la stratégie de communication de l’entreprise». HeHe tente de monter un projet similaire à Dunkerque, où la ville lui réserve un accueil positif, s’engageant même à en couvrir les frais, à condition qu’ils trouvent une usine disposée à jouer le jeu. La seule à avoir «un beau panache» est l’aciérie Arcelor, qui refuse.
Le Nuage vert finit par se déployer en Finlande, invité par le festival d’arts électroniques Pixelache, où il encercle, en février 2008, les émissions d’une centrale thermique au charbon, en plein Helsinki. Le dispositif mis au point par HeHe fonctionne sur deux modes : le laser, couplé à une caméra thermique, épouse la forme du panache, mais il peut aussi être connecté aux données de production de la centrale. C’était le cas à Helsinki. Ainsi le 29 février 2008, entre 19 et 20 heures, le duo a invité les habitants à débrancher leurs appareils électriques afin de réduire leur consommation énergétique pour voir grandir le nuage.
«Nuage vert esthétise une icône de la pollution industrielle tout en cherchant à attirer l’attention critique du spectateur», explique HeHe. L’opération Unplug ! fut couronnée de succès. «Elle a été rendue possible grâce au travail étroit avec le tissu local et à la coopération active de la centrale qui nous accueillait», explique Heiko. La centrale a mis à leur disposition les données de consommation électrique en temps réel du quartier, influençant directement la taille et la forme du nuage, à la fois sculpture environnementale et outil de mesure de consommation énergétique.
Le Nuage vert remporte un franc succès, auréolé de prix dans de prestigieux festivals internationaux comme Ars Electronica et 01SJ, qui saluent le geste artistique, «sa capacité à englober une ville entière, sa sphère publique, ses acteurs industriels et ses habitants». La Fondation d’art environnemental de Finlande le couronne «œuvre de l’année». En 2009, le projet est lauréat d’une bourse à l’innovation, financée par la région Ile-de-France, pour le festival Futur en Seine qui se déroule actuellement. A cette occasion, le Nuage vert devait embraser - enfin - le ciel de Saint-Ouen. Pas si simple.
Dès l’automne dernier, HeHe multiplie les courriers à la mairie (PCF) de Saint-Ouen et recontacte le Syctom pour obtenir leur soutien et leur participation. «L’interaction avec les habitants fait intégralement partie du projet. Mieux ils trient, moins ils jettent et plus grand sera le nuage, symbole de l’effort collectif des citoyens dans la prévention des déchets ménagers et l’économie d’énergie. Nous leur avons expliqué que nous souhaitions recueillir des flux de données sur l’activité de l’usine, comme la qualité du tri fait par les habitants, les tonnages journaliers de déchets valorisés…», expliquent-ils.
Fin janvier, après une longue période d’atermoiements, la mairie, tout en saluant «le geste artistique ambitieux, formidable prétexte pour lancer une démarche d’éducation populaire autour des déchets», renonce à y prendre une part active. Suivie par le Syctom, qui craint que «cette projection laser sur le panache suscite des incompréhensions, voire des inquiétudes de la part du public». En clair, que l’on attire l’attention des riverains sur ces fumées… «La signification de la fumée d’usine s’est modifiée à travers l’histoire. Au début de la révolution industrielle, elle indiquait la prospérité et depuis les années 80, elle est devenue l’îcone ultime de la pollution», reconnaît Helen. Depuis la pose d’un nouveau filtre en 2005, l’incinérateur de Saint-Ouen est pourtant en conformité avec les normes européennes en matière d’émissions polluantes, relève le duo. «Le Syctom craint que ce nuage ne fasse peur aux gens en symbolisant la toxicité des émanations de l’incinérateur. Le Centre national d’information indépendante sur les déchets n’y est pas non plus favorable, parce qu’il pense, au contraire, que ça donne une image positive de l’usine d’incinération. Le Nuage vert est ambigu, il n’offre pas un message moralisateur simpliste, mais confronte le citadin avec un spectacle esthétique ouvert à l’interprétation», explique ses promoteurs.
Réunion houleuse
Le 26 février, HeHe organise une réunion de la dernière chance en présence du directeur de l’environnement de la centrale d’Helsinki, conviant les décideurs politiques et industriels de Saint-Ouen. Peine perdue ? Les seuls à accueillir favorablement le projet sont les petites associations locales, comme celle pour la qualité de la vie. C’est qu’entre-temps, par une (mal ?) heureuse coïncidence, l’incinérateur de Saint-Ouen s’est retrouvé au cœur d’une polémique sur l’aménagement des anciens Docks, une friche industrielle de 100 hectares, que la municipalité entend transformer en «écoquartier». Un éco-quartier à l’ombre d’un incinérateur…
L’opposition à la municipalité communiste dénonce aussitôt la présence de cette usine dans le futur quartier résidentiel. Et organise un débat sur les «risques sanitaires des incinérateurs pour les populations». La mairie réplique en organisant une réunion publique houleuse le 27 avril, devant une salle comble et un public hostile.
«Le timing était mauvais, la mairie était en train d’éteindre le feu autour de l’incinérateur, ils n’ont pas voulu voir les fumées de l’usine éclairées en vert au même moment, constate Helen. De notre point de vue, pourtant, c’est un moment idéal. Le Nuage vert n’est pas qu’un geste spectaculaire et événementiel dans l’espace public. C’est un long processus, une réflexion dans et sur l’environnement. Il aurait pu être un vecteur pour pacifier les discussions. Si on veut régler la question des incinérateurs, il faut s’attaquer aux vrais problèmes : celui de nos déchets.»
Dans un tel contexte, les tests «pirates» de HeHe ont été fraîchement accueillis par la municipalité. «Nous avons eu des coups de fils affolés des riverains, commente Daniel Guérin, directeur de cabinet du maire, qui déplore que la mairie n’ait pas été prévenue. «Le nuage, dans ce climat tendu, risque de nourrir des réflexes de peur et d’être instrumentalisé. C’est la raison pour laquelle nous avons jugé inopportun de le présenter dans le cadre du festival Futur en Seine, en accord d’ailleurs avec la région. Cela ne signifie pas forcément faire une croix sur cette initiative, la réflexion se poursuit.» HeHe justifie ses tests : «Au-delà de la validation technique, ils poussent les élus à prendre nos intentions au sérieux et à ouvrir un dialogue.»
«Changer de regard»
Le lendemain du test, la directrice de communication du Syctom appelle les artistes et leur reproche d’être intervenus sur le panache sans leur accord. «Mais ce nuage n’appartient pas à l’usine. Il appartient à tout le monde ! réplique Helen. On expulse les déchets en périphérie, comme tout ce qui nous encombre, et on tente de cacher ces infrastructures. Les incinérateurs de dernière génération, sont étudiés pour que leurs émissions ne soient pas visibles, conduisant à une forme de déresponsabilisation. Notre projet est de rendre la chaîne de gestion des déchets plus visible. Pour changer de perception et d’attitude au quotidien, nous avons besoin de stimuli esthétiques autant que de messages pédagogiques.» Un avis que partage l’Association citoyenne pour la qualité de vie à Saint-Ouen. «Nous proposons une campagne pluricommunale sur le tri sélectif afin de baisser le tonnage des déchets brûlés, explique Denise Bourdier. Dans ce cadre, l’intervention d’HeHe, nous a paru une excellente opportunité.» Finalement, jeudi 28 mai, la préfecture de Seine-Saint-Denis a rejeté la demande d’autorisation, formulée le 17 mars, invoquant «les risques non négligeable de troubles susceptibles d’être créés par leur initiative.»
(1) Le projet est présenté à Mal au Pixel, festival des cultures électroniques, du 2 au 7 juin, à Mains d’Œuvre, 1 rue Charles Garnier, à Saint-Ouen. www.nuagevert.org et www.malaupixel.org
Ci-dessous le communiqué de la réunion organisée par La Mairie pour contrer les polémiques autour de l’incinérateur:
Au coeur du débat: l’usine de traitement des déchets
Réunion publique le 24 avril de 19h à 21h - Espace Pierre Cardin- 33, bd Victor-Hugo
Syctom : Déclaration de la Municipalité de Saint-Ouen
Une campagne partisane, actuellement menée à propos de la présence de l’usine de traitement des ordures ménagères du Syctom à Saint-Ouen, provoque des discussions, souvent dénuées de fondement objectif, sur son éventuel impact en matière d’environnement et de santé publique.
La Municipalité a décidé de faire de l’environnement et du développement durable une grande priorité du mandat. Je me réjouis d’ailleurs de l’encouragement que constitue la décision que vient de prendre l’Etat de retenir le nouveau quartier des Docks parmi les 8 premiers écoquartiers d’Ile-de-France, le seul avec celui de l’Ile-Saint-Denis à être situé en petite couronne.
C’est dire que la Municipalité de Saint-Ouen est très attentive à toutes les questions liées au traitement des ordures ménagères et à la pollution, qui doivent être abordées avec sérieux, objectivité et transparence.
La signature, dès 2004, d’une Charte de Qualité Environnementale avec le Syctom et la Tiru, prévoyant le strict respect des normes européennes en la matière, avait déjà témoigné de la volonté municipale de garantir et d’améliorer l’environnement à Saint-Ouen, comme le montre à nouveau aujourd’hui le projet des Docks dont l’axe essentiel est celui du développement durable.
Dans le droit fil de cette démarche, et à partir des enseignements issus du travail de réflexion et de diagnostic actuellement mené en liaison avec l’ensemble des partenaires concernés, la Municipalité a décidé d’organiser une rencontre publique le vendredi 24 avril, avec la contribution de plusieurs personnalités scientifiques. Cette initiative permettra à tous les Audoniens qui le souhaitent de prendre toute leur part au débat sur cette importante question.
Communiqué de la Municipalité de Saint-Ouen - 25 mars 2009
[ + d'infos - http://www.syctom-paris.fr/edi/comm/comm/stouen/presentation.htm ]
Premier teste à Saint-Ouen, le 27 mars 2009 à 20h50, photo par HeHe
Nuage Vert Saint-Ouen from HeHe on Vimeo
Ci-dessous le communiqué de la réunion organisée par l’association Convergence Citoyenne pour creuser en profondeur la question des déchets. Les organisateurs ont accordé 10 minutes au projet Nuage Vert, et c’est la première présentation publique à Saint-Ouen. À noter l’arrière-plan dans la vidéo, une peinture murale présente une cheminé à côté des tours, à contre jour d’un beau fumé jaune!
Voici le communiqué:
Déchets, incinérateur… : Quelles alternatives possibles??
Déchets, Veille écologique
Des éco-citoyen(ne)s, l’association Convergence Citoyenne, les Verts de Saint-Ouen-sur-Seine ont créé lundi 26 janvier un groupe de travail sur le thème : Déchets/Incinérateur
Il a pour objectif de réfléchir et d’agir sur :
- la réduction des déchets liés à notre mode de vie, de consommation et de production,
- l’évaluation et la diminution des impacts nocifs pour la santé de l’incinérateur en
fonctionnement jusqu’en 2020 dans notre commune.
Nous souhaitons sur ces thèmes en collaboration avec d’autres partenaires, sensibiliser les citoyens aux éco gestes et rencontrer entreprises, associations, commerçants et municipalité afin de proposer et faciliter la mise en place de mesures concrètes.
Premier rendez vous (à ne pas manquer) durant la semaine nationale du développement durable 2009 (http://www.semainedudeveloppementdurable.gouv.fr/)
Jeudi 2 avril à partir de 20h30
bourse du travail,
30 rue ambroise Croizat
Saint-Ouen-sur-Seine
Avec:
- Hervé Pernin, Ingénieur déchets, Ademe - Ile de France
Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie
- Helen Bourges, Cniid
Centre national d’information indépendante sur les déchets
- Alain Rouault, Vice Président du Syctom, Président du Sitom 93
Syndicat intercommunal de traitement des ordures ménagères 93
Après le débat, nous vous proposons de poursuivre la discussion autour d’un pot convivial.Ce groupe de travail est ouvert à toutes et à tous, n’hésitez donc pas à nous rejoindre en contactant : Isabelle de Kochko - Mail : convergence.citoyenne at club-internet.fr, ou
Franck Rolland 06/85/27/16/10
Débat sur incinération from HeHe on Vimeo